Collectif les petits bonheurs d'antan
Affiche réalisée par Lu MIGNON
Un collectif auquel j'ai pris plaisir à participer !
Mon texte "L'atelier de pépé"
est illustré tout en douceur
par Leïla BRIENT
Pour se rendre dans l'atelier de pépé, il fallait emprunter un long couloir très étroit, sombre, un peu biscornu, un peu froid. Je n'aimais pas ce couloir. Mais pour rien au monde je n'aurais laissé ma place, car au bout c'était un peu comme le paradis !
La porte s'ouvrait sur un immense établi tout lézardé qui trônait au milieu.
En me hissant sur la pointe des pieds, j'arrivais à sa hauteur, le plus souvent je m'y râpais le bout du nez. Mais j'avais tellement envie de voir les marteaux, tournevis, serre joints accrochés en file indienne.
Des outils que pépé avait faits lui-même.
C'est les rabots que je préférais. Je les trouvais tellement bizarres. Par quel bout ça se prenait ces machins là ? C'était toujours pour moi un vrai mystère.
Pépé avait des gestes précis. Il parlait peu. Il riait beaucoup, ça équilibrait.
Les planches entre ses doigts rugueux ne faisaient que passer. Ziiip ! Elles partaient dans une douce glissade, presque une caresse, et se retrouvaient coupées en deux par l'énorme scie de la machine dont les dents m'impressionnaient.
Aie ! J'imaginais souvent le pire ! Les dents qui mordaient la main de pépé ou la mienne. Je me faisais des films, je voyais mon bras planche coupé en deux. Ziiip !
Et puis la voix de pépé qui me rappelait à la réalité : dis donc arsouille, tu fais attention hein ?
Ce qui me remonte dans le nez, c'est l'odeur de la sciure. Mmmm... ces copeaux qui faisaient comme de gros flocons bruns, blancs, parfois un peu piquants.
Il neigeait beaucoup dans l'atelier de pépé. De la sciure il y en avait partout jusque sur le vieux poêle qui engloutissait de grosses bûches pour nous réchauffer.
Pépé, c'était un faiseur de neige de bois ! Un inventeur comme il n'en existe pas !
Et moi j'aimais ces moments là ... où tout commence. Où tout est à imaginer.
Juste des planches qui font Ziiip ! Et pépé qui m'appelle arsouille.
J'ai toujours quitté l'atelier de pépé à regret. Aujourd'hui, mes mots m'y entraînent à nouveau. Ziiip ! Ils glissent d'une phrase à l'autre. En flocons bruns, blancs, parfois un peu piquants.
Sous des dents imaginaires qui m'impressionnent toujours autant.